Le choix de l’accès à l’eau pour lutter contre le choléra

En République démocratique du Congo, la réémergence du choléra est un problème majeur de santé publique, en particulier en milieu urbain. Face à ce constat, de nombreux acteurs du développement, dont la Fondation, mettent en œuvre une stratégie concertée pour lutter contre la propagation du choléra.

Le choléra, maladie d’origine hydrique qui cause des vomissements et des diarrhées foudroyantes, connaît une résurgence dramatique en République démocratique du Congo (RDC). Les victimes se comptent, chaque année, par milliers. Les facteurs de contamination sont connus : la bactérie du choléra se transmet, entre autres, par de l’eau contaminée lorsque les conditions de traitement de l’eau et d’assainissement sont insuffisantes. Le lien entre la maladie et l’accès à l’eau potable a été démontré dès le XIXe siècle, en Angleterre. Aujourd’hui, il est avéré. Or, en en RDC, seuls 16 % de la population accèdent à l’eau potable*.

Une première phase dédiée aux études épidémiologiques

Des premières études, menées en 2007 par des médecins congolais et par des épidémiologistes français de l'université de Besançon soutenus par la fondation Veolia, ont mis en lumière la corrélation entre le développement de l'épidémiologie de choléra et le manque d'accès à l'eau potable en RDC. Le ministère de la Santé publique congolais a réagi en lançant un grand plan stratégique national pour l'élimination du choléra (2008-2012) fondé sur une démarche intégrant la santé, l’eau, l’hygiène et l’assainissement. La démarche s’appuie sur un partenariat renforcé mêlant les ministères congolais concernés, des ONG locales et internationales, des experts en matière d'infrastructures urbaines d'eau et d'énergie ainsi que des bailleurs internationaux (Agence française de développement, Union européenne, fondations privées). Le plan a été prolongé en 2012 par un Plan multisectoriel d’élimination du choléra (PMSEC), un programme quinquennal validé par les représentants de nombreuses provinces de RDC lors d’une importante réunion organisée par la fondation Veolia en mars 2016.

Sur le terrain, la mise en œuvre du plan a consisté, pendant une première phase de quatre ans, à collecter des informations pour comprendre la dynamique de diffusion de la maladie. Ce travail a conduit à dresser une cartographie précise des zones sources d'épidémies du choléra pour cibler les zones d'intervention prioritaires et préconiser les travaux nécessaires en termes de création et réhabilitation des réseaux et stations d'eau potable. Huit villes foyers d'émergence ont ainsi été identifiées dans l'Est de la RDC, pour la plupart situées en bordure de lacs.

Kalemie, première zone d’intervention

Kalemie, située sur le rivage du lac Tanganyika, dans la province du Katanga, a été la première à bénéficier du programme de lutte contre le choléra. De nombreux acteurs internationaux sont intervenus sur le terrain : médecins congolais, représentants de la Regideso (régie de distribution d’eau) congolaise, ONG telles que Solidarités International et Médecins sans Frontières, ou encore volontaires Veoliaforce. Les missions menées par ces experts de la fondation Veolia ont permis de réaliser un schéma directeur des réseaux hydrauliques de la ville avec un double objectif : cibler les besoins en apport d'eau potable et définir les mesures prioritaires pour renforcer la veille épidémiologique.

Les travaux de réhabilitation et de sécurisation du réseau d'eau existant ont été conduits avec succès. La Regideso a vu le nombre d’abonnés à l’eau augmenter de 46 % ! La capacité de traitement de la station de traitement d'eau potable construite avec le gouvernorat de la province de Katanga a doublé. Un nouveau réservoir a vu le jour et le réseau a été étendu au nord et au sud de la ville grâce à Médecins sans frontières et à Solidarités International. La Regideso bénéficie également d’une autonomie financière renforcée.

Réhabilitation et sécurisation des réseaux d'eau à Uvira

A partir de 2008, la Fondation s’est engagée sur un deuxième terrain, en parallèle de son implication à Kalemie. Des missions exploratoires ont conduit des experts Veoliaforce dans une autre zone pré-identifiée par les études épidémiologiques : Uvira, dans la province du Sud-Kivu. Objectif ? Evaluer l’état des infrastructures d’eau potable.

Les analyses réalisées ont conduit à mettre en place des mesures d’urgence, réalisées par Oxfam Grande-Bretagne avec la Regideso, pour sécuriser rapidement la production et la distribution d'eau potable dans la ville. Ce travail a été prolongé par la fondation Veolia qui a conçu, avec le soutien de la fondation Artelia, un schéma de développement de réhabilitation et d'extension des infrastructures d'eau potable de la ville. En 2013, l’AFD et l’UE ont accepté de financer la mise en œuvre, sur trois ans, de ce programme de développement des infrastructures en eau.

Trois étapes de travaux ont été définies :

  • La réhabilitation et l'extension du réseau de distribution ;
  • La construction d'un réservoir de grande capacité ;
  • Le doublement de la capacité de production de l'usine.

En 2016, des appels d’offres ont été lancés pour engager les travaux, en assurer le suivi, mener des audits et commencer à structurer le tissu communautaire autour des nouveaux accès à l’eau qui seront prochainement ouverts. Les fondations Veolia, Artelia assurent les études techniques liées à la mise en place du réseau et du réservoir. L'ONG Oxfam Grande-Bretagne supervise le volet sociétal : mesures d'éducation, de prévention et de sensibilisation à l'hygiène. Enfin une ONG Congolaise, ADIR, s’occupe de structurer les communautés d’Uvira en associations d’usagers permettant d’augmenter la prise de conscience par la population du besoin d’accéder à une eau potable pour lutter contre le choléra.

Un suivi scientifique du programme

Le programme conduit depuis dix ans en RDC fait l’objet d’une évaluation scientifique par un partenaire de la fondation Veolia, engagé à ses côtés de longue date. La London School of Hygiene & Tropical Medicine (LSHTM) suit le projet depuis les origines pour en mesurer l’efficacité.

L'évaluation d'impact financée par la Fondation suit une méthodologie d'essai randomisé par clusters (« RCT - Randomized Controlled Trial »). La ville d'Uvira, au cœur de l’étude, a été divisée en 16 « clusters ». Les travaux d'amélioration du réseau d'eau potable, et donc de l'accès à l'eau, sont réalisés cluster par cluster, et définis de manière à ce que les travaux puissent se réaliser sur chacun séparément et en un temps à peu près similaire. L'ordre dans lequel les travaux s'effectuent est aléatoire : il a été défini par tirage au sort. Au fur et à mesure de l'avancée des travaux, les clusters ayant bénéficié d'une amélioration de l'accès à l'eau permettent d'évaluer l'impact de cette amélioration sur l'incidence du choléra, en comparaison des clusters témoins qui n'auront pas encore bénéficié des travaux.

La pré-étude menée sur la période 2009-2013 démontre la réalité tangible du lien entre l'accès à l'eau potable et le choléra à Uvira. La LSHTM révèle ainsi que le Centre de traitement du choléra d'Uvira reçoit trois fois plus d'admissions dans les dix jours qui suivent une interruption de production d'eau potable, et que 25,3 % des cas de choléra sont inhérents à une baisse de production d'eau potable. Une prestigieuse revue scientifique, PLoSMed (Public Library of Science Medicine), s’est fait l’écho de cette démonstration.

Retrouvez la conférence de l'AFD du 18/09/2023 sur l'évaluation du programme "eau potable" d'Uvira par la London School of Hygiene and Tropical Medecine :

Au final, les résultats s'ils confirment la pré-étude seront un puissant outil de plaidoyer en faveur d'actions structurelles dans le domaine de l'eau pour lutter contre le choléra.

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*Source : OMS

 

Une association innovante d’acteurs locaux et internationaux

Le programme de lutte contre le choléra mené en RDC repose sur une association innovante d’acteurs locaux et internationaux. Le plan lancé en 2008 par les pouvoirs publics congolais s’appuie sur un partenariat renforcé entre les ministères congolais concernés, des ONG locales et internationales, des experts en matière d'infrastructures urbaines d'eau et d'énergie ainsi que des bailleurs internationaux (AFD, Union européenne, fondations privées). Ces parties prenantes forment ensemble un « carré magique » pour une action efficace et durable.

La GAAC

La fondation Veolia a initié en 2010 une alliance internationale de lutte contre le choléra : la Global Alliance Against Cholera (GAAC), dont la légitimité repose sur l'autorité de ses membres. Depuis sa création, l’Alliance a étendu ses opérations à d'autres pays touchés par le choléra.


Publications

Humanitaire et Développement

Lieu

République démocratique du Congo (RDC), dit Congo Kinshasa

Parrains

Franck Haaser
Thibaut Constant
Damien Machuel

Dotations

26 300 € au Comité de sélection du 03/07/2007
390 000 € au Conseil d’administration du 15/03/2010
100 000 € au Conseil d’administration du 18/02/2013 (étude de la London School of Hygiene & Tropical Medicine)
250 000 € au Conseil d’administration du 23/06/2014
550 000 € au Conseil d'administration du 27/06/2016 (sur trois ans)
130 000 € au Conseil d’administration du 12/06/2017 (étude de la London School of Hygiene & Tropical Medicine)
427 000 € au Conseil d’administration du 16/12/2019
60 000 € au Comité de sélection du 06/04/2022
100 000 € au Comité de sélection du 19/10/2022

Porteurs du projet

Global Alliance Against Cholera (GAAC)

Fondation Veolia pour soutenir la Regideso

London School of Hygiene & Tropical Medicine (LSHTM)


 

Comprendre le choléra en 6 vidéos

01-Lutter contre le choléra, une fatalité ?

 

02-Les armes contre le choléra ?

 

03-Des bailleurs, des ingénieurs, des ONG et la population

 

04-Eau : production, stockage, distribution

 

05-Eau et santé : mesurer l'impact sur le choléra

 

06-Ressource partagée et gouvernance 

 

Témoignages de Florent Bédécarrats, Didier Bompangue, Agnès Bougoyé Shagayo, Philippe Bosse, Rita Colwell, Thibaut Constant, Cheikh Fall, Aurélie Jeandron, Steve Kazanga, Martin Leménager, Damien Machuel, Olivier Ndugu Chihyoka, Jaime Saïdi et Thierry Vandevelde.